Abeille sauvage et pollen
GDR Pollinéco 2020

[SEBIOREF] De nouveaux résultats présentés au GDR Pollinéco

Le Groupement De Recherche (GDR) Pollinéco fédère 160 chercheurs, de 36 laboratoires francophones, sur la pollinisation, les réseaux d'interaction plantes pollinisateurs et la fonctionnalité des écosystèmes liée aux pollinisateurs. Deux chercheurs du projet SEBIOREF y ont présenté, en octobre 2020, l'avancée de leurs recherches respectives : l'un sur la modélisation des effets du paysage sur l'abondance des abeilles sauvages, l'autre sur les influences respectives et complémentaires des différents habitats boisés et herbacés sur les communautés d'abeilles sauvages. Ils témoignent de ce que leur a apporté cette participation.

Quelle est la distance maximale à laquelle un paysage affecte l’abondance des abeilles sauvages ?

Auteurs : James Desaegher1, David Sheeren1, Annie Ouin1,2,3

Résumé: Pour les écologues du paysage, il est essentiel d'identifier la distance à laquelle le paysage affecte l'abondance des espèces. Pour cela, on réalise une analyse « multi-échelle » pour calculer l’échelle d’effet [du paysage] (scale of effect, en anglais), l'étendue paysagère qui maximise la qualité d’ajustement entre les variables paysagères et l'abondance des espèces. Sans connaissances préalables, une étude multi-échelle est chronophage et parfois trompeuse. Notre objectif était d'estimer la distance au-delà de laquelle il est peu probable de détecter l’échelle d’effet pour les espèces d'abeilles, selon leur distance moyenne de butinage. En utilisant le modèle de pollinisation InVEST, nous avons i) modélisé différentes catégories d'abeilles avec des distances de butinage distinctes et identifié l’échelle d’effet sur leur abondance simulée ii) défini un indice, noté λ, estimant la distance au-delà de laquelle les variables du paysage n'ont que des effets « négligeables » sur les abondances simulées. Nous avons validé nos résultats en identifiant l’échelle d’effet sur les abondances de 16 espèces d'abeilles collectées près de Toulouse. Une relation significative a été détectée entre la distance moyenne de butinage des abeilles modélisées et leur échelle d’effet. L'indice λ, fortement corrélé aux distances de butinage, était supérieur à l’échelle d’effet des abeilles modélisées et supérieur à l’échelle d’effet pour 15 espèces d'abeilles.

James Desaegher témoigne "Étant donné le caractère très méthodologique de mes travaux, ma présentation au GDR Pollinéco a été une occasion de prendre du recul par rapport à mes résultats. J’ai été amené à vulgariser les méthodes que j’ai utilisées et à bien mettre en lumière les résultats importants. Cet effort était essentiel, car le résultat principal des travaux présentés - une équation permettant de prédire la distance à laquelle le paysage influence l’abondance des espèces d’abeilles - pourrait servir à de nombreux écologues de la pollinisation."

 

Les habitats semi-naturels boisés sont complémentaires des prairies permanentes pour soutenir une diversité d’abeilles sauvages dans les paysages agricoles.

Auteurs : Justine Rivers-Moore1,2,3, Emilie Andrieu1,3, Aude Vialatte1,2,3, Annie Ouin1,2,3.

Résumé : La perte d'habitats semi-naturels (HSN) dans les paysages agricoles affecte les abeilles sauvages, souvent de manière négative. Cependant, la manière dont les communautés d'abeilles réagissent varie et n'est toujours pas claire. À ce jour, peu d'études ont utilisé des descripteurs précis pour comprendre ces effets. Notre objectif était de comprendre les influences respectives et complémentaires des différents habitats boisés et herbacés sur les communautés d'abeilles sauvages. Nous avons sélectionné trente paysages de 500 m de rayon sur un gradient de pourcentage de HSN boisés dans le sud-ouest de la France. Dans chaque paysage, nous avons échantillonné des abeilles sauvages au printemps 2016 et des plantes au printemps 2015 et 2016 en bordure de forêt, dans une haie et dans une prairie permanente. Le pollen porté par les espèces d'abeilles les plus abondantes a été collecté et identifié. En utilisant des indices de diversité beta, nous avons montré que la composition des communautés d'abeilles sauvages diffère entre les trois types de HSN, et surtout entre les HSN herbacés et boisés. En se basant sur l'indice de sélection de Jacobs, nous avons montré que le pollen de certaines espèces végétales enregistrées dans les HSN boisés était consommé préférentiellement par les abeilles sauvages. En étudiant l'impact de la perte de chaque type de HSN sur le réseau d'interaction abeille-pollen, nous avons constaté que les HSN boisés contribuent à sa résilience, permettant des interactions plante-abeille spécifiques. Dans l'ensemble, nos résultats soulignent la contribution non négligeable des habitats semi-naturels arborés à la diversité des abeilles sauvages dans les paysages agricoles, et donc l'importance de maintenir différents types d'HSN.

Justine Rivers-Moore témoigne : "ça a vraiment été une bonne opportunité de présenter mes résultats à ces rencontres. D'abord parce que je viens de soumettre un article sur ce travail : le présenter à l'oral permet de concrétiser cet aboutissement. De plus, les chercheurs du GDR Pollinéco sont spécifiquement concernés par le sujet, et sont donc de bons juges de la qualité du projet et des résultats. Or, leurs retours sur ma présentation et l'intérêt du sujet traité sont positifs ! Certains chercheurs ont également partagé des informations complémentaires non publiées qui appuient ou complètent les résultats que j'ai obtenus. C'est précieux !"

Organismes d'appartenance des différents auteurs mentionnés

  • 1 INRAE, UMR Dynafor, 31326, Castanet-Tolosan, France
  • 2 University of Toulouse, INP-ENSAT, UMR DYNAFOR, 31326 Castanet Tolosan, France
  • 3 LTSER Zone Atelier « PYRÉNÉES GARONNE », 31320 Auzeville-Tolosane, France

Voir aussi

Le GDR Pollinéco regroupe 160 chercheurs et (post)doctorant(e)s issus de 36 labos principalement en France mais aussi en Belgique et en Suisse. Il est financé par l’INEE et le Ministère de la Transition Écologique et est coordonné par B. Schatz (CEFE, CNRS, Montpellier). Il comprend cinq axes : 1) Traits floraux et stratégies de pollinisation, 2) Écologie des pollinisateurs, 3) Réseaux d’interaction plantes-pollinisateurs et 4) Changements globaux et conservation et 5) Agriculture et services écosystémique. Le GDR Pollinéco permet de fédérer la recherche française et francophone en écologie de la pollinisation. Il soutient des projets de recherche à des échelles plus larges (nationales, voire internationales), comme par la création d'une base de données nationales de caractères écologiques de pollinisateurs ou de plantes. Il permet aussi l'accès facilité et gratuit à des différentes formations (identification de pollinisateurs, analyse de réseaux d’interactions etc). Il soutient la publication d'articles des membres du GDR dans des numéros spéciaux de revues scientifiques internationales.

(site web du GDR Pollinéco en construction)